9 novembre 2009

Glandulaire

Serge Voronoff (1866-1951) juif russe fuyant les pogroms se retrouva, après moult péripéties, directeur du laboratoire de chirurgie expérimentale du Collège de France où il eut l'amusante spécialité de greffer un nombre raisonnable de testicules de chimpanzés sur quelques hommes avides de retrouver une vigueur perdue, ou presque.

Pour ce qui est des péripéties, entre les pogroms et le Collège de France, Voronoff avait commencé par tester sur lui-même ses revigorantes expériences. En 1889 il s’était injecté des tissus de testicules de cochon d'inde dans le scrotum avec un résultat problématique puisque nul quant à la vigueur. Pas découragé il s'oublia (et les cochons d'inde avec) un peu par la suite et poursuivis ses bidouillages sur d'autres bestioles moins rabat-joies... moutons, chèvres, taureaux... Les testicules de ces bestioles jeunes et pimpantes étaient transplantés sur d'autres, plus décrépites et ramollies avec cette fois-ci un résultat totalement concluant : les vieux boucs revivaient à la lubricité et Voronoff décida de passer derechef à l'étape suivante : l'homme et son corps spongieux !

Notre toubib madré commença par pratiquer la transplantation de testicules de criminels fraîchement exécutés sur des millionnaires rabougris. Le succès fut tel qu'il fut bientôt à court d'assassins assassinés ! Avec bonheur il utilisa alors en « remplacement » des testicules de chimpanzés et de babouins (on y vient) !
Au début des années 1930, des milliers d'hommes avaient ainsi été traités par les techniques revigorantes de Voronoff. Pour faire face à la demande, il fit bâtir sa propre ferme à singes à Menton et il employa un ancien gardien de cirque pour gérer et diriger le tout.
Ensuite ce fut le Collège de France et bizarrement le discrédit, un procès en charlatanerie et en psychosomatisme que rien ne pouvait laisser prévoir. Nous resterons silencieux quant à cette disgrâce que ne méritait visiblement pas le bon Docteur Voronoff.

P.-S. Outre une vigueur toute nouvelle, le traitement Voronoff était censé soigner la myopie, les troubles de la mémoire et la « dementia praecox » un bon remède en somme.

E. E. Cummings parle d'un « célèbre docteur qui insère des glandes de singe dans des millionnaires » (« famous doctor who inserts monkeyglands in millionaires »).

Dans les soirées chics des années vingt, les mots « glandes de singe » étaient sur toutes les lèvres.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

J'ai lu mais je ne sais plus ou que Charles Maurras aurait été "soigné" par votre bon docteur peut être qu'il soignait également la surdité. On parle de votre Mabuse dans le roman de Michel Braudeau, "L'interprétation des singes" édition Folio n° 3973

Bernard Alapetite