23 novembre 2008

Roulotte

« De tous ces voyages, je n’ai jamais rien tiré pour mes livres »

En 1925 Raymond Roussel se fit construire une roulotte automobile, une voiture-salon, une Rolls-roulotte bien à lui. Outre un cabinet de toilette, un salon avec lit escamotable, un secrétaire, un bar et une cuisinière, on y trouvait un dortoir amovible (et versatile) destiné au petit personnel (deux chauffeurs et un valet.)
Quelques quidams inquiets et néanmoins piétons du siècle dernier auraient vu ce curieux attelage (anxiogène, tel un corbillard surdimensionné) arpenter certaines routes européennes d’Alsace en Suisse, de Turquie en Italie, d’Italie en France et de France en Italie… Mussolini l’aurait visité en 1926 tout comme un nonce apostolique envoyé là par un pape curieux... et futé, puisque flairant intuitivement une proto papamobile possible.
Lassé par le tourisme grandissant, la banalité croissante des Palaces, Raymond Roussel finit par s’enfermer dans sa Rolls-roulotte (son palace à lui) où, reclus, il fit mine de vivre en compagnie de sa maîtresse officielle, Charlotte Dufrène… Jolie couple en très petit indoor avec la domesticité amovible sur les côtés… Le véhicule, chambre noire inhalant couple et lumière, n’était plus « quitté » que pour de lumineuses activités liées à une toxicomanie galopante, White Light comme dirait l’autre…

NB : Raymond Roussel est mort d’un accès de barbiturique dans la nuit du jeudi 13 au vendredi 14 juillet 1933, entre minuit et deux heures du matin c’était dans la chambre n°224 (aujourd’hui n°225) du Grande Albergo delle Palme à Palerme un palace non motorisé où le tintammaresque Wagner avait précédemment composé Parsifal, vous voyez le truc qui fait crincrin ?

Ps : La Rolls-roulotte fut présentée au salon de l’automobile 1925. Les derniers mots de Raymond Roussel (à Charlotte Dufrène ) : « Ne t'inquiète pas ».

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