30 avril 2013

Prêcheur

Que Dieu nous préserve des voisins bricoleurs. Que Dieu nous préserve du gel dans les cheveux, des chaussures à bouts carrées et de la vox populi. Que Dieu nous préserve des crétins convaincants. Que Dieu nous préserve des charmeurs de serpents sur la place Jemaa-el-Fna à Marrakech. Que Dieu nous préserve des films de Michael Haneke. Que Dieu nous préserve des païens à flambeaux.

27 avril 2013

Ennuyé

Pour qui veut atteindre les hautes extases, un solide ennui est bien utile.

25 avril 2013

Bricoleur

Le soleil enfin là je me réjouissais déjà devant la perspective de pouvoir lire en position semi-alanguie dans mon semi-jardin au presque grand air. Mal m’en pris puisqu’au bout de trois pages surhumaines du père Nietzsche j’ai dû constater bien malgré moi que mon voisin de gauche, profitant du « beau temps » avait décidé de réparer son toit. Quant à mon voisin de droite (un bourgeois bohème roulant en véhicule 4x4), il avait, lui, décidé de reprendre la construction de sa piscine idéale entreprise il y a pas moins de trois ans. À ma gauche (le toit), j’ai donc dû subir les assauts sonores et répétés d’une scieuse, d’un pistolet à clou et d’autres instruments indéfinissables tandis qu’à ma droite (la future piscine idéale) s’élevaient les vrombissements d’une pelleteuse tout autant dinosauresque qu’enrobée de vapeurs nauséabondes. Vous conviendrez qu’avec tous ces désagréments entremêlés il m’était quasiment impossible de me concentrer sur une lecture qui requiert un minimum de concentration (la lecture de ce bon vieux Nietzsche demande un minimum de concentration). Si l’on ajoute qu’outre le bruit et l’odeur, mon voisin de gauche (le toit) a laissé choir sans vergogne divers objets, copeaux, clous et tuiles, à même mon semi-jardin sans même vérifier s’il était occupé par le moindre quidam (je dois être transparent) il y a de quoi rester dubitatif devant la relative neutralité frontalière de nos voisins « bricoleurs ». Un peu las, un peu triste, resigné, je suis rentré dans mes intérieurs pour poursuivre, à l’abris, une lecture qui méritait d’être poursuivie, mais l’envie n’était plus là et j’ai assez vite oublié mon livre pour me complaire dans une sourde neurasthénie. Il faisait si beau dehors.

22 avril 2013

Masochiste

Notre désir de souffrance est tel que nous nous créons des monstres à combattre.

21 avril 2013

Dominical

« J’ai beaucoup aimé les dimanches. Si, à présent je les aime moins c’est peut-être parce que j’en ai trop vu ou bien que, d’une manière générale, je ne sache plus rien aimer autant qu’auparavant. » (Henri Calet, Poussières de la route)

15 avril 2013

Sibyllin

Celui qui voit la vraie lumière ne tient jamais à lui-même.
 
Ainsi, le chien reste-t-il entre deux daims.

12 avril 2013

Humain

« Pauvre vie. Pauvres vies. Calet ne parla jamais que des humbles, comme Dabit, comme Guilloux, comme Bernanos. Il aura aimé ceux qui passent, et qui vont mourir, et qui le savent, et font semblant de ne pas le savoir, et enfilent des chandails, des culottes, se lavent les dents, chient, vont au boulot, reviennent, baisent, se couchent, par n'importe quel temps, chient, rebaisent, dorment, ne dorment pas, et à la fin se mettent à pleurer silencieusement, car enfin, enfants, ils rêvaient tout de même d'une autre vie, car enfin, oui, cela il faut bien le dire, rêvaient d'une autre vie. Calet l'a dit. Saloperie d'existence. Car ce n'est pas ainsi qu'il aurait fallu vivre. Malgré tout, comme le séjour fut beau. On s'en souvient encore. A Suresnes, nous avions parfois mangé des moules et des frites et bu du vin rosé. En bras de chemise, sous les tonnelles. Comme les années furent belles. Et tous ces corps désespérants de femmes que l'on a serrés contre soi. C'est ma jeunesse et je n'en ai pas d'autre. On a eu que cette pauvre vie là. C'est mieux que rien. Quand on est le fils de Madame Caca, on ne peut pas être très exigeant. (…) Il savait où il allait, oui, Henri Calet. Longtemps communiste, il avait fini par s'habituer à vivre sans espoir. Rien que la mort. » (JP Martinet)

11 avril 2013

Félin

Un tigre lucide et normalement constitué ne s’attaquerait jamais à une bestiole aussi peu intéressante que l’homme. Il y a certes ce tigre du Bengale qui dévora plus de quatre cent personnes, mais il le fit après s’être abimé la mâchoire et les pattes antérieures en tentant d’avaler un porc-épic.

9 avril 2013

Gastronome

Le vautour commence toujours son festin en dévorant l’anus de sa proie, c’est la partie la plus tendre.