30 décembre 2011

Resalé

Il faut savoir que d’une manière générale les excréments d’oiseaux possèdent plus de sel que ceux des autres animaux. C’est d’ailleurs pourquoi lors de la fameuse famine en Samarie les hommes se servirent de fiente de pigeon en guise de sel. Que les plus délicats d’entre vous se rassurent, il n’y a rien de rebutant dans ce substitut-là, il suffit de le gouter pour l'apprécier.

17 décembre 2011

Pachydermique

Chez les anciens l’éléphant n’a pas de jointures. Il est incapable de se coucher alors il dort le corps appuyé contre un arbre. Les chasseurs l’apercevant dans cette position n’ont alors plus qu’à scier l’arbre sur lequel il se repose presque complètement, l’éléphant tombe et ne se relève plus. L’astuce est simple, il suffit de savoir ne pas réveiller la grosse bestiole qui dort.

16 décembre 2011

Taiseux

Trop à dire, mais trop de paresse pour le dire. C’est pourquoi je ne vous dis rien tout en vous disant que je ne vous dis rien.

15 décembre 2011

Malchanceux

« Mordu par son cheval, à Joinville, le cocher Colignon s’évanouit ; alors, sa voiture lui broya les jambes. »

(Félix Fénéon, Nouvelles en trois lignes)

6 décembre 2011

Veuf

Depuis que j’ai enterré ma femme dans le jardin, je dine de plus en plus souvent en ville.

3 décembre 2011

Appâli

« Les souvenirs glissent au bleuâtre lointain, si frêles, appâlis, mélancoliques.»

(Gustave Kahn, Les Palais nomades)

2 décembre 2011

Plagiaire

Quand je me regarde dans une glace, je suis toujours tenté de l’essuyer.

27 novembre 2011

Impératif

Il faut remettre Faulkner à sa place, celle d’un écrivain un peu bancal qui joue aux intéressants en se compliquant volontairement la prose. Il aurait tort de ne pas le faire. Cela fonctionne à merveille. La glose monte. Le niveau des flasques de whisky descend . C'est presque un cercle. Il peut bientôt tituber au millieu.

Voilà ce n’est pas très intéressant, mais je tenais à vous dire tout ça. À bientôt.

13 novembre 2011

Frontalier

« L’agent voyer avait toujours eu le respect des frontières, des bornes que l’on posa entre les heures du jour comme entre les départements de la France, et il aimait à ne se coucher qu’à minuit juste, de même qu’il s’amusait encore, à la limite du Bourbonnais et du Berry, à poser le pied droit dans le Cher, le pied gauche dans l’Allier, ou bien, le corps dans une province, à ne laisser dans l’autre que son ombre. »

(Jean Giraudoux, Provinciales)

10 novembre 2011

Salaud

Le problème des sentiments c’est qu’ils ne nous laissent jamais à l’abri du sentimentalisme. Voilà peut-être pourquoi je préfère rester ce salaud au coeur sec que vous connaissez tous. L'antipathie notoire me sied parfaitement.

7 novembre 2011

Funèbre

François Fillon annonçant son terrifiant « plan de rigueur » ressemble un peu trop à un croque-mort charbonneux qui se frotterait les mains devant la tâche à accomplir. C’est un problème.

6 novembre 2011

Délicat

« Voilà que pour pleurer, je dois penser à ce qui m’est indifférent, à ce qui ne souffrira pas : à des linges effilochés, au vernis des pieds de table, qui brûlent d’un feu sans lueur ; à un petit couteau que j’ai perdu dans un champ où il y avait une mare, des barrières, des ombres, des poiriers, et que je devine si rouillé, si désorienté entre le gravier et les herbes, que c’est mon Dieu, à désespérer. »

( Jean Giraudoux, Provinciales)

2 novembre 2011

Cacophonique

Les plus aventureux (et masochistes ?) d’entre vous pourront écouter la suite de mes malingres pérégrinations musicales à cette adresse : Wobbly music for nothing.

Veuilliez m'excuser par avance.

1 novembre 2011

Syntaxique

Les mots me viennent dans un désordre assez peu recommandable et ils fanent instantanément, comme ça, sur pied, dans ma tête. Voilà peut-être pourquoi mes phrases finissent par s’écrouler sur elles-mêmes.

27 octobre 2011

Vide

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18 octobre 2011

Chimique

Je pense que je suis presque parvenu à atteindre les divers « points limites » que je m’étais fixé : ne plus exister pour quiconque, ne plus « être au monde », évoluer vers l’invisibilité et finalement devenir une sorte d’entité vaguement chimique ; un corps pur avec une seule molécule et un seul type d’atome. Voilà en fait je me rapproche petit à petit de l’Azote. L’Azote est très bien, il est incolore, il n’a aucune conductivité électrique, il est un peu utile, mais on ne le voit pas, il est presque idéal.

10 octobre 2011

Bourgeonnant

« Si l'on voulait appliquer à l'homme la parabole du figuier stérile, on pourrait peut-être dire ceci : le bon, le doux, le grand jardinier ne le jette pas au feu pour autant ; à chaque printemps il regarde le feuillage stérile, et à chaque printemps il le laisse verdir, jusqu’à ce que les feuilles se fassent de plus en plus rares, jusqu’à ce qu’enfin ne se dressent plus que les branches desséchées. Alors, l’arbre est arraché du jardin, et à sa place on met autre chose. Les autres plantes, elles, continueront à fleurir et à croitre, mais nulle ne pourra dire qu’elle est issue de ses graines, ni que les fruits savoureux qu’elle porte viennent de lui. Toujours et toujours le soleil fera descendre sa lumière, toujours le ciel bleu sourira, de millénaire en millénaire, et la terre se revêtira de son ancienne verdure et les générations descendront leur longue chaine jusqu’au dernier enfant : lui seul est exclu de tout cela, parce que son existence n’a formé nulle image, parce que les bourgeons ne lui permettent pas de descendre le fil du temps. Même s’il a laissé après lui d’autres traces, celles-ci s’effaceront comme s’efface tout ce qui est terrestre, et quand enfin tout aura disparu dans l’océan des jours, les choses les plus grandes, les plus grandes allégresses, lui disparaitra d’abord parce que tout en lui sombre déjà tandis qu’il respire, tandis qu’en lui persiste la vie. »

(Adalbert Stifter, L'Homme sans postérité)

8 octobre 2011

Montebourgien

J’aime beaucoup Arnaud Montebourg, il a toujours cet air nigaud que prend le vrai faux coupable chez l’oncle Alfred.

1 octobre 2011

Touristique

Goethe en Sicile monte au-dessus de Montreal. Le panorama et la nature sont plaisants (moins aujourd’hui, il y a une autoroute et la mafia). Outre le paysage (la baie de Palerme), la faune et la flore, il y a les pierres et rochers. Goethe est un sacré géologue qui a tout pour ravir l’amateur de cailloux. Il décrit à merveille tous les quartz et granites environnants. Ses amourettes avec la caillasse finie on le retrouve ensuite à flanc de montagne, il déguste deux trois tranches de saucisson, laisse trainer les peaux par terre, un chien errant les mange (n’oublions pas que Goethe est vaguement touriste et surtout allemand).

28 septembre 2011

Kadhafiste

Les échos qui me parviennent du Kadhafi « privé » sont unanimes et concordants. Dans le « civil », celui que d’aucuns voient comme un autocrate sanglant serait un type plutôt charmant. Un type prévenant avec son épouse, aimant avec ses petits et grands enfants. Bref un type bien et attentionné, tellement bien et attentionné qu’un halo de bonté semblerait même parfois s’échapper au-dessus de sa belle chevelure bouclée. Tout cela bruisse, tout cela n’est pas rien, tout cela est presque tout et je ne dis pas cela parce que je trouve le Livre Vert de Mouammar très bien écrit.

19 septembre 2011

Inutile

« À chaque instant, chacun de nous, êtres éphémères, parmi ses amours ou ses combats, traverse un état singulier, unique, goûte un plaisir qu’il n’a plus goûté ou ne goûtera plus, ou souffre une souffrance inouïe, inconnue à tout autre et à lui-même. Cela est, n’a plus été, ne sera plus, et cela semble être la raison d’être de tout ce qui se répète, s’adapte et s’oppose ! Et, à travers cela, quelque chose d’inaccessible est poursuivi, une plénitude, une totalité, une perfection, platonique passion de toute âme et de toute vie. La poursuite de l’impossible à travers l’inutile : serait-ce donc là vraiment le dernier mot de l’existence ? »

(Gabriel Tarde, L’opposition universelle)

13 septembre 2011

Expiré

Finalement, ce n’est pas l’inspiration qui me manque, ce n’est pas l’envie non plus, non ce qui me manque c'est ce que le commun des quidams  appel la volonté (l’énergie qui va avec, l’ambition, ce genre de choses.) J’ai toujours été très peu velléitaire, je le serai certainement jusqu’au bout. En fait je suis constitué d’une multitude de renoncements, car, voyez-vous, j’ai toujours trouvé plus utile de renoncer devant l’adversité que quoique ce soit d’autre. Je n’ai donc aucune ambition, tellement peu que je ne satisfais même pas les envies qui me viennent. Ainsi, je me renonce aussi, je préfère ne rien faire pour moi, pas plus que je ne préfère faire quelque chose pour les autres. Je pourrais certainement ne pas oublier les autres en m’oubliant, je pourrais certainement mieux faire, mais à quoi bon ; sommes-nous ici pour mieux faire ?

12 septembre 2011

Indien

8 septembre 2011

Sournois

Ma pensée plus élevée que mon être, il m’arrive parfois de considérer ma propre vie comme ridicule. Je me regarde alors me perdre dans des ténèbres inextricables et je ricane sournoisement, c’est un problème.

7 septembre 2011

Intranquille

« Considérant que chaque événement de ma vie était un contact permanent avec l’horreur du Nouveau, que chaque personne nouvelle que j’approchais était un nouveau et vivant fragment de l’inconnu, que je plaçais sur ma table pour une méditation quotidienne, remplie d’épouvante – j’ai décidé de m’abstenir de tout, de ne viser à rien, de réduire l’action au minimum, de me dérober enfin le plus possible, pour n’être retrouvé ni par les hommes, ni par les évènements, de raffiner sur l’abstinence et de pousser cette abdication à la dernière extrémité. Tant le seul fait de vivre me terrifie et me torture. »

(Fernando Pessoa, Le livre de l'intranquilité)

3 septembre 2011

Contraint

Plus que de l’invention ou quoique ce soit d’autre : le vécu, les émotions, il nous faudrait plutôt tenter : avec de l’aléatoire, des contraintes. Prospecter du côté des chiffres. Ne pas commencer par le zéro.

30 août 2011

Fané

Un flétrissement inflétrissable, un tourment épanoui, immortel, une timidité de rose et des plaintes.

27 août 2011

Misogyne (un peu)

« Il faut faire un assez petit cas des femmes, mais nous émouvoir à les regarder et nous admirer de ressentir pour d’aussi maigres choses un sentiment aussi agréable. »

(Maurice Barrès, cité par André Maurois)

20 août 2011

Télégraphique

Je suis télégraphique pour ne pas me priver de rester fainéant.


19 août 2011

Rien

« J’interrogeai mon être, je considérai rapidement tout ce qui m’entourait ; je demandai aux hommes s’ils sentaient comme moi ; je demandai aux choses si elles étaient selon mes penchants, et je vis qu’il n’y avait d’accord ni entre moi et la société, ni entre mes besoins et les choses qu’elle a faites. Je m’arrêtai avec effroi, sentant que j’allais livrer ma vie à des ennuis intolérables, à des dégoûts sans terme comme sans objet. J’offris successivement à mon cœur ce que les hommes cherchent dans les divers états qu’ils embrassent. Je voulus même embellir, par le prestige de l’imagination, ces objets multipliés qu’ils proposent à leurs passions, et la fin chimérique à laquelle ils consacrent leurs années. Je le voulais, je ne le pus pas. Pourquoi la terre est-elle ainsi désenchantée à mes yeux ? Je ne connais point la satiété, je trouve partout le vide. »

(Senancour, Oberman)

17 août 2011

Austral

Quant à la flore des Kerguelen il y le fameux chou. On ne sait pas d’où il vient, mais on sait que son gout est piquant et poivré. On sait aussi qu’il faut se garder de le cuire à l'eau, car il émet alors une odeur musquée qui rappelle étrangement le parfum des filles les moins vertueuses de la casbah d’Alger.

Quant à la faune des Kerguelen, il y a ce chat étonnant, ce félin importé au crâne réduit et triangulaire. Un matou, qui sans adversité, ne réfléchit plus et se retrouve avec un cerveau tout rabougri. Je concède aisément que l’on soit effrayé par la géométrie bizarre de cette tête inusitée, il faut bien le dire.

(Un grand merci à Jean Paul Kauffmann et à son Arche des Kerguelen qui m’ont permis de bricoler ces deux peccadilles).

12 août 2011

Économiste

Jadis quand nous nous épuisions au labeur notre fatigue n’avait pas ce côté navrant et « pour rien » que nous connaissons aujourd’hui. Le grand capital était l’ennemi, il était identifiable, palpable, tellement palpable qu’avec le peu d’énergie qu’il nous restait nous pouvions parfois le séquestrer et lui faire rendre gorge. Il tremblait alors en pensant à sa boite de havanes, là en dessous dans le tiroir de droite. Il tremblait puis il faisait semblant de compatir tout en concédant un peu. Aujourd’hui nous nous fatiguons dans des tâches abstraites que nous commandite une entité indiscernable : le marchéfinancié. Allez séquestrer une entité indiscernable et vous m’en reparlerez ! Le marchéfinancié est inséquestrable, c’est un monstre gazeux et sans odeur, un monstre insensible et sourd. Pire c’est un monstre qui ne nous en veut même pas ; il ignore tout de notre existence, il a bien autre chose à faire : rester abstrait, tourner en rond dans l’eau pour rien, trouver un pavillon de complaisance, faire son gazeux inodore.

7 août 2011

Sournois

La mise en harmonie de notre nature réelle avec les pesantes réalités du monde est certainement l’un des buts les plus sournois de toute existence.

4 août 2011

Atmosphérique

« L'homme à certaines zones corporelles - son corps est le plus proche. Ce qui l'entoure d’abord forme sa deuxième zone. Sa ville et sa province la troisième, et ainsi de suite jusqu’au soleil et à son système. La zone la plus intérieure est en quelque sorte le moi et celui-ci est opposé comme l’abstraction, la contraction suprême, à l’univers qui est la réflexion, l’expansion, suprême. Ainsi le point de l’espace atmosphérique. »

(Novalis, Fragments)

3 août 2011

Calme



Calme apparent aux alentours de Bihać (Bosnie-Herzégovine)

2 août 2011

Végétatif

Récupérant petit à petit d’un long week-end alcoolisé j’ai passé l’essentiel de ma journée en plongeant dans de longues flaques de narcolepsies qui m’ont laissé pour ainsi dire noyé et oscillant vers le végétatif. C’est donc un genre de potamot nageant qui vous parle. Le potamot nageant possède des feuilles allongées, il flotte entre deux eaux au gré du niveau d'eau, ce n’est pas un problème en soi ; enfin dans la mesure où il conserve la capacité de rêver les pieds dans l’eau.

1 août 2011

Abstrait

Me regardant un peu de biais dans mon miroir ce matin j’ai constaté que si mon âme est de plus en plus organique il faudrait que mon corps devienne, lui, un peu moins abstrait.

21 juillet 2011

Motivé

Il faudrait donc se corriger pour être heureux, donner de nouvelles habitudes à notre désir de bonheur. Tout cela me parait bien compliqué.

18 juillet 2011

Déçu

Je suis tellement décevant que je ne me déçois même plus.

10 juillet 2011

Psychogéographe

« Vers le soir, je me suis encore perdu, sans guide, dans les quartiers les plus reculés de la ville. Ici les ponts sont tous pourvus d’escaliers, afin que les gondoles et aussi les bateaux plus grands passent commodément sous les arches. J’ai cherché à me démêler dans ce labyrinthe sans questionner personne, et toujours sans autre direction que les points cardinaux. On finit par s’en tirer, mais c’est un incroyable fouillis, et ma méthode, de m’en convaincre par mes yeux, est la meilleure.. J’ai aussi observé, jusque dans la dernière petite retraite habitée, la vie, les habitudes, les mœurs et les manières de ce peuple : elles diffèrent dans chaque quartier. Bon Dieu, que l’homme est une pauvre et bonne bête ! »

(Goethe, Voyage en Italie)

« Balades lentes dans la ville qu’ignorent bien évidemment (et heureusement) les entreprises touristiques, car il n’y a rien d’autre à voir dans ces parcours que la poésie à l’état brut, ce que des promeneurs payants ne sauraient apprécier, poésie des pierres, des pavés, des bornes, des portes cochères, des fenêtres mansardées, des toits de tuile, de l’herbe rare, des arbres, inattendus, des impasses, des passages, des culs-de-sac, des cours intérieurs, des hangars dépôts de charbon ou de matériaux de construction, des entreprises de démolition, poésie des chantiers, des terrains encore vagues, des boulodromes, des bistrots buvettes, poésie des couleurs, mais aussi poésie des odeurs qui varient à chaque pas-de-porte… Itinéraires qui serpentent à l’infini, interminables pour qui sait flâner et voir, a le culot d’entrer dans les cours, les cités, les voies privées, la tranquille attitude du gars partout chez lui, et qui sifflote en passant devant les habitants… »

(Jean-Paul Clébert, Paris insolite)

8 juillet 2011

Plié

Le Kafka de Deleuze (et Guattari) n’est pas celui de Vialatte. Chez Vialatte Kafka est un employé de bureau gris, mais farceur, qui quitte son chapeau mou pour lire ses histoires cauchemardesques devant un petit aréopage d’amis bien choisis. L’atmosphère est très début de siècle, l’aréopage se bidonne tout on se tapant sur les cuisses et c’est très bien ainsi. Chez Deleuze (et Guattari), on ne se bidonne plus, Kafka n’est même pas un « homme écrivain », c’est un homme politique, un homme-machine, un homme expérimental qui fournit des protocoles d’expériences. On l’imagine mal faisant le paon gris devant ses amis qui pouffent, il a bien autre chose à faire : lutter contre son père, jongler avec des idées, être moderne, ce genre de trucs.
Un esprit lourdaud et peu éclairé comme le mien trouvera que Gillou est toujours pris par ses concepts, que ses abstractions mentales ne font que s’auto alimenter tout en ayant la puérile manie de vouloir beaucoup prêter aux autres. Chacun sait la grande générosité des sciences molles, elles prêtent beaucoup pour exister, ce n’est pas une raison.

Cela dit il faut peut-être aimer Deleuze, pour son rythme, sa « musique » et, malgré son alter et gros psy, on peut parfois se laisser bercer par lui. (Tout en étant moins dupe que le premier nourrisson qui trépasse).

2 juillet 2011

Vertébré

« Bien que nous lisions avec notre esprit, le siège du plaisir artistique se situe entre les deux omoplates. Ce petit frisson dans le dos est, sans doute aucun, la plus haute forme d’émotion à laquelle a atteint l’humanité, lorsqu’elle a découvert l’art pur et la science pure. Soyons fiers d’être des vertébrés, car nous sommes des vertébrés couronnés d’une divine flamme. Le cerveau n’est que la continuation de la moelle épinière. La mèche traverse réellement toute la longueur de la bougie… »

(Vladimir Nabokov, Littératures)

26 juin 2011

Poli

Je ne sais pas si l’humour est vraiment la politesse du désespoir? Peut-être ? Disons que c’est une éventualité tangible. Tenez prenez Alexandre Vialatte, il était drôle tout en étant globalement désespéré à sa façon. Un désespéré délicat et attentionné, pas plus sur lui que sur les autres, avec ce confondant trop-plein de politesse qui lui faisait lever son chapeau mou lorsqu’il lui prenait l’idée d’écrire. Ainsi, il était poli et désespéré en bien, comme d’autres sont malpolis et désespérés en pire.

L’aphorisme que tous les journalistes et autres bocards de mots utilisent, le fameux : « L’humour est la politesse du désespoir » n’est pas, comme on le croit trop souvent, l’œuvre de Chris Marker (ou de Boris Vian), non c’est une pensée d’Achille Chavée, un surréaliste belge, de seconde main, qui doit se trouver posthumément fort marri de se voir ainsi si mal cité… J’écris si mal cité, car figurez vous que le commun des quidams cite mal Achille ! Voilà sa vraie phrase : « L’humour NOIR c’est la politesse du désespoir. » On accordera que l’adjectif change beaucoup de choses ; en tous les cas, il a l’avantage d’ouvrir une rime désespérée, ce qui n’est pas rien.

20 juin 2011

Cervical

Après le poignet droit et la cheville droite me voilà avec «les cervicales bloquées » il m’est absolument impossible de tourner la tête dans quelque que sens que ce soit, c’est fort dommage, car la saison veut que je sois tenté de faire pivoter ma tête en tous sens. Ainsi aujourd’hui j’ai été dans la plus totale incapacité de tournebouler sobrement mon regard sur les fesses et seins (juvéniles ou pas) que j’ai eu l’honneur de croiser. Imaginez mon désarroi, mon trouble (non comblé) et ma grande tristesse ! Je souffre et de surcroît me voilà qui passe pour un homme marié, pour un quasi et sinistre mâle nourrice non misogyne, bref un type bien… beurk ! Et puis en dehors de tous mes problèmes de rotation, hormonaux et mécaniques, ma douleur irradie depuis mon côté gauche alors que mes autres douleurs (cheville, poignet) irradient, elles, à partir de mon côté droit. Je ne suis donc plus du tout symétrique ! Je ressemble à un drôle de bonhomme qui serait Charlie Chaplin et Éric Von Stroheim tout à la fois, c’est un problème ; je crois que je vais boire pour m'oublier.

18 juin 2011

Lépidoptériste

« La littérature, la vraie littérature, ne saurait être avalée d'un trait comme une potion bienfaisante pour le coeur ou pour le cerveau. La littérature doit être émiettée, disséquée, triturée ; vous devez sentir son parfum délicieusement âcre dans le creux de votre main, vous devez la mastiquer, la rouler sur votre langue avec délices ; alors, et alors seulement, vous apprécierez son incomparable saveur à sa juste valeur, et ces fragments, ces miettes redeviendront un tout dans votre esprit, révélant la beauté d'une unité à laquelle vous avez donné un peu de votre propre sang… »

(Vladimir Nabokov, Littératures)

14 juin 2011

Douloureux

Je me suis tordu la cheville droite au labeur, je dirai qu’avec ma tendinite au poignet droit tout va donc pour le mieux puisque tout est d’une impeccable verticalité et d’un équilibre droitiste qui a tout pour réjouir le quasi maniaque que je suis. Imaginez qu’en lieu et place de la cheville droite je me sois tordu la cheville gauche ? j’aurai eu l’air bien malin, avec mon poignet droit douloureux, hein mes amis ! Voilà, je suis ravi, ma douleur est parfaitement symétrique, bien alignée à droite, une jolie douleur très bien tirée, une petite merveille. Pour le reste, du côté du cœur, tout va pour le mieux il est toujours 2/3 à gauche et 1/3 à droite…

Tenté de lire quelques pages du Journal de Stendhal. Je dis tenté, car les phrases du père Beyle me sont toutes tombées des yeux. En fait, j’étais déconcentré, et comme préoccupé, par mes petits embarras corporels ; il fallait que je calme l’une de mes belles douleurs symétriques, que je pose quelques glaçons sur ma cheville douloureuse ! Le seul problème est que je n’avais plus de glaçons, car, très peu méfiant, figurez-vous que je les avais tous utilisés pour noyer mes Martinis Dry de la semaine dernière ! Imaginez mon embarras, ma souffrance… alors Stendhal, hein !!

Je vous laisse, je ne peux plus écrire, mon poignet droit est décidément trop douloureux.

11 juin 2011

Étanche

Le problème c’est que pour pouvoir écrire il faut être en dehors de la vie et que pour avoir de quoi écrire il faut être dans la vie. Ce grand écart demande beaucoup de souplesse, beaucoup d’accointances avec les bords débordants d’un monde qui ne demande qu’à nous imbiber. Je ne sais pas si je suis suffisamment souple pour ce genre de gymnastique ; en tous les cas il me semble que suis très étanche.
Voilà, peut-être pourquoi je déçois…

10 juin 2011

Nuageux

« Jeux des nuages - jeu de la nature, essentiellement poétique… »
(Novalis, Fragments)

Lorsqu’ils forment une masse compacte, homogène et agglomérée, les nuages n’ont rien d’intéressant pour eux. Ils ont simplement la capacité d’éveiller la neurasthénie qui sommeille en nous. Nous voilà alors loin de Goethe, Baudelaire ou Bachelard, loin de la recherche du satori et des beaux cumulus détachés sur un ciel bleu que nous chérissons tous.

8 juin 2011

Ancillaire

Toute cette affaire (DSK) m’a donné des envies de Casanova. Comme ça vlan ! oh oui Casanova ! j’ai donc rouvert ses mémoires au hasard et je dois dire que le hasard a bien fait les choses puisque je me suis retrouvé assez vite en prison ! En prison, puis en galante compagnie ! Allez savoir comment et pourquoi ! Bon pour le reste si le Casanova terminal était bohémien du nord et bibliothécaire à Dux, scribe de lui-même et rangé des diligences, j’imagine un destin moins calme pour notre ex futur président potentiel.

6 juin 2011

Aristocratique

« Mes amis ! je m'en vais de ce pas ». Ce furent les derniers mots du marquis de Bièvre, mourant près de Spa où il était allé prendre les eaux, allez savoir pourquoi.

Quant au chevalier de Champcenetz, qui n'était jamais le dernier pour un bon mot, voilà son dernier qu’il lança gaiement tout en montant vers l'échafaud : « ne pourrait-on pas se faire remplacer ? »

5 juin 2011

Manuel

« Le mur est intact. Le maçon n’est lié qu’à ce qu’il fait. Et qui tient. Voilé par la mort. Que toute présence nous voile. »

(Thierry Metz, Journal d'un manœuvre)

26 mai 2011

Chinois

Cher M Hermès,

Tenez aujourd'hui J’ai eu la malencontreuse idée de porter ces chaussettes chinoises que j’avais achetées pas plus tard qu’il y peu chez un grossiste en textile à bas coût. Je dois dire que quant aux chaussettes j’aurais dû rester si ce n’est national tout du moins non exotique, car me voilà avec deux belles plaques d’urticaire sur chaque mollet. Ces deux plaques on beau être amusantes un moment (tiens des plaques!) et d’une symétrie à peu près parfaite elles forment tout de même une sorte de problème puisque j’ai passé ma journée à me frotter les mollets. Sinon j’ai failli rouvrir le Journal de Stendhal, mais je l’ai laissé choir au bout de trois pages, la motivation n’était pas vraiment là et toutes les façons il fallait que je me gratte les mollets, c’était une nécessité et chacun sait que nécessité fait loi.

Bien à vous.

20 mai 2011

Ferroviaire

En Amérique les trains Pullman ne valent pas nos Wagons Lit, la promiscuité y est gênante, si gênante que l’Américaine moyenne est, parfois, obligée d’arpenter les couloirs en tenue légère. Quand on connaît la légendaire pudeur moyenne de l’Américaine moyenne, on a tout lieu de trouver cela moyen.

13 mai 2011

Fatigué

Lorsque je ne suis pas las et que la fatigue n’est pas là non plus je peux parfois développer deux trois idées, oh ! pas si savantes que ça, mais deux trois idées quand même. Par contre lorsque la fatigue est là et que je suis bien las, je ne suis plus qu’un corps ahuri où rien ne passe plus par le cogito, mais où tout passe par la sensation. Cet état d’extrême fatigue entraîne certainement d’incontestables et rares éclairs d’intelligence chez certains, mais la plupart du temps chez moi c’est l’intellect d’une méduse plus lymphatique que stupéfaite qui surgit mollement. Voilà un problème (ce court paragraphe en est la preuve).

11 mai 2011

Anglomane

« … un gentleman, un vrai, c’est bien près d’être, voyez-vous, le type le plus sympathique qu’ait encore produit l’évolution du pitoyable groupe de mammifères qui fait en ce moment quelque bruit sur la terre. Dans l’effroyable méchanceté de l’espèce, les Anglais établissent une oasis de courtoisie et d’indifférence. Les hommes se détestent ; les Anglais s’ignorent. Je les aime beaucoup. »

(André Maurois, Les silences du Colonel Bramble)

10 mai 2011

Opportuniste

Le meilleur nomment de la journée ? Le matin entre 9 h et 11 h (plus précisément 10 h 30). L’air est encore frais et l’ambiance est pour l’essentiel monacal. Aucun bruit, les enfants à l’école (qu’ils y restent !) leurs parents sont au labeur (qu’ils y restent aussi !) et il n’y a que quelques oiseaux pour nous rappeler la banalité du vivant (et du faiblement bruyant). C’est l’heure idéale pour ne rien faire, pour lire aussi, parfois…
Ne me parlez pas de la « tranche » comprise entre 17 h et 18 h 30, elle est absolument horrible et à tout du délire machiniste.

7 mai 2011

Pollué

Pittsburgh fait passer Düsseldorf, Rive-de-Gier et Saint-Chamond pour des campagnes parfumées où l’autochtone fume de longues pipes paresseuses dans l’air bleu. À Pittsburgh le ciel est chargé de méthane et l’on y croise des trains entiers remplis de métal en fusion ! Alors ne me parlez pas de l’industrialisation de la Ruhr et de la Loire, merci ! pff ! 
 

3 mai 2011

Fâcheux

Dans son si inutile Journal Inutile le vieux Morand est constamment fâcheux et d’une bêtise plus accessible qu’insondable. Il lui faut sans cesse faire son bileux en secouant de vilaines diatribes contre les juifs, les pédés et les lesbiennes… Et puis quand il évoque ses éjaculations, c’est assez dégoûtant, il faut bien le dire.

29 avril 2011

Mithriaque

Lu trois chapitres de Jules Huret en Amérique (l’hospitalité des campagnes, le week-end et son invention… ), trois pages du journal de Charles du Bos (assez moroses) et une promenade philosophique de Remy de Gourmont (impeccable, as usual…)
J’ai fini l’après-midi sous les nuages et pour me consoler il m’a fallu ouvrir au hasard les promenades dans Rome de l’ami Stendhal. Le hasard fait bien les choses puisqu’il y était question du Panthéon, du Panthéon et de son fameux trou ! Le Panthéon cette trace impeccable selon certains… En tous les cas, il faut sûrement en vouloir beaucoup aux premiers chrétiens, car si ces derniers avaient su consacrer plus de bâtiments antiques à leur culte naissant nous aurions incontestablement plus de Panthéons un peu partout. Des Panthéons avec des trous, des grosses colonnes et plein de trucs qui remontent. En fait, je me demande si en son temps le trop malin Constantin n’aurait pas fait une erreur en choisissant Jésus plutôt que Mithra. J’ai bien l’impression que cette divinité perse, qui faisait aussi sa Romaine, aurait pu faire un autre Jésus tout autant valable, elle avait beaucoup de points communs avec le hippie nazaréen, tout du moins ses adeptes, les fameux mithriaques pratiquaient-ils aux aussi le baptême, la communion et les jeûnes divers et variés. Mithra était comme son collègue Jésus, un genre de médiateur entre Dieu et les hommes et puis si ses disciples ne sacrifiaient pas grand-chose ils sacrifiaient surtout du pain et du vin, ce qui fait un sacré point commun ! Les mithriaques croyaient eux aussi en la vie future, au paradis, ce genre de choses, j’ai juste le sentiment qu’eux auraient su conserver les trous et plein d’autres Panthéons.

26 avril 2011

Hermaphrodite

Tenez il y a cette histoire d’androgynie mal placée ! saviez-vous que certains parasites farceurs ne trouvent rien de mieux que de se placer sur le sexe de leurs victimes ? Ainsi, on raconte que certaines bestioles paraissent soudainement mâles alors qu’elles sont incontestablement femelles, voire femelles, alors qu’elles sont incontestablement mâles ! Cet hermaphrodisme inopportun est parait-il coutumier chez certains crustacés mâles : le crabe par exemple. Régulièrement il se retrouve femelle par mégarde ! Censément fécondable, mais pas fécondable ! On concédera que tout cela peut être la source de multiples désagréments (ou pas) et on comprend mieux l’air éprouvé de cette bestiole carapacée pour rien.
Le cas est parait-il également valable pour certains oiseaux malchanceux (ou pas).

23 avril 2011

Rien

Ma barbe de six jours m’a abandonné, je l’ai rasé ce matin. J’arbore des lunettes à verres progressifs, car je ne vois plus très bien de près. Je porte un tee-shirt noir hors d’age, je n’ai pas besoin de plus, je suis en intérieur. J'écoute une musique assez morose en me grattant l’omoplate gauche et je pense que je vais ouvrir La Marche de Radetzky de l’ivrogne Roth. Il doit y avoir une méprise quelque part.

12 avril 2011

Motivé

Ce n’est pas l’inspiration qui me manque, c’est l’envie. Disons que pour que l’envie revienne, il faudrait qu’un besoin incontrôlable et impérieux d’écrire me saisisse à nouveau. J’en suis loin, je déçois et je me déçois, je redeviens peu velléitaire, voire légumineux, je me contente de mon propre vide.

3 avril 2011

Chineur

En cherchant quelque chose de Jean Paul (Richter) qui ne soit pas trahi par Germaine (de Staël) j’ai trouvé une traduction de Titan par le bien improbable Philarète Chasles. Je ne sais pas si je vais me risquer à feuilleter tout ça. Philarète me paraît un peu suspect, il a été éduqué dans un Prytanée national militaire ce qui pourrait bien le faire basculer de facto du côté de la raideur et du napoléonisme primaire… D’un autre côté, je vois que Philarète une fois sorti de son Prytanée a bel et bien scribouillé dans la Revue des deux Mondes… alors bon, quoi j’hésite… Peut-être que concernant Jean Paul (Richter) je vais me contenter du Choix de Rêves disponible chez José Corti. Le spicilège est traduit par Albert Béguin (un gage de qualité) et il me semble « intuitivement » moins risqué de lecture.

1 avril 2011

Acrobatique

À Tamworth, pays des mulots, les chouettes sont si replètes qu’elles ne peuvent se percher de face sans risquer de basculer tête-bêche. C’est un problème.

Merci, Jean...

25 mars 2011

Coloré

Le fameux peintre André Derain est mort sur un lit blanc dans une chambre blanche, entouré de médecins en blanc. Ses derniers mots furent : « Du rouge, montrez-moi du rouge. Avant de mourir je veux voir du rouge... et du vert ! »

22 mars 2011

Télévisuel

En guise de lecture je regarde Jouhandeau chez Pivot. Il est si mignon avec sa toque en fourrure.

13 mars 2011

Victorieux

Ma lutte contre la morne appétence de cet hiver persistant n’aura pas été vaine. Il a bien failli m’avoir, mais finalement c’est moi qui l’ai eu. Ainsi, il agonise et moi je suis là, vivant toujours, encore…

Tiens pour célébrer cette victoire, ma victoire, je me suis « mis » devant le soleil et j’ai lu quelques pages de Ramón Gómez de la Serna. Pour l’anecdote, je dirai que ces pages étaient d’un esprit tendre et éclairé et qu’elles étaient presque toutes délicieuses. Ensuite j’ai dégusté une madeleine que j’ai accompagnée par une quantité mesurée de Coca Zero (l’aspartame est cancérigène). Puis un peu repu et assez fatigué par une rude journée de labeur je me suis endormi face au soleil (le soleil est également cancérigène).

Me réveillant à l’instant je constate que le soleil est déjà passé sous les toits, que la fraîcheur tombe et que mon optimisme météorologique était peut-être un peu trop précoce. On annonce un tremblement de terre au Japon, un Tsumani et des morts à foison.

« Le crépuscule met un tel silence dans la demi-obscurité, un tel détachement, un tel renoncement, quelque chose de tellement immatériel qu’il y a un moment où la chambre semble être solitaire, inhabitée, sans nous-mêmes. On s’est tellement imprégné de mutisme, tellement abandonné à la mort de la lumière, à son secret, à sa décomposition fluide et invisible, qu’à l’instant où l’on veut se ressaisir, on n’est plus. On s’est évanoui, en tant que pure et simple conscience de la chambre elle-même ; quelque chose de semblable au mystère de la métempsycose ou de la désincarnation s’est opéré ; nous avons été comme peu à peu absorbés par les murs ; nous nous sommes retirés. »

(Ramón Gómez de la Serna, Échantillons)

10 mars 2011

Chinois

On aurait tort de voir Victor Segalen comme un bizarre féru de « chinoiseries universelles ». S’il est, à coup sûr, bizarre et un peu chinois il est aussi bien plus haut que sa simple excentricité, sur d’autres faîtes, dans un magnifique hors-là, dans l’exote et le désir de ce qui n’est pas soi ; c’est-à-dire beaucoup. Il faut aimer l’étrangeté, le mystère, de cette poésie coupante comme le mica, il faut aimer ce grand foufou de Segalen, c’est un ordre !

Et puis il y a cette fin, cette mort : la mort de Segalen. On retrouve son corps dans la forêt de Huelgoat. Il est posé sur une roche, au pied d’un arbre, un exemplaire (ouvert) d’Hamlet traîne à ses côtés… tout cela est très mystérieux.

« Je consacre ma joie et ma vie et ma piété à dénoncer des règnes sans années, des dynasties sans avènement, des noms sans personnes, des personnes sans noms. »

1 mars 2011

Mobile

En 1928 Alexandre Vialatte publie son premier roman Battling le Ténébreux, il s’installe à Firminy (ce qui arrive à des gens très bien). Pourtant dès l’année suivante (1929 !) le voilà qui déménage encore et déjà ! vers Clermont-Ferrand cette fois-ci ! Bon dans cette localité humide (forcement humide) il avait trouvé une toute fraîche épouse, mais je ne sais pas si c’est une raison vraiment suffisante pour déménager aussi souvent !

25 février 2011

Trépassé

« Je suis sans désir de retour, sans regrets, sans hâte et sans haleine. Je n'étouffe pas. Je ne gémis point. Je règne avec douceur et mon palais noir est plaisant. »

(Victor Segalen, Stèles)

22 février 2011

Égotique

Parvenant à ne plus exister aux « autres » il est bien possible que je me révèle enfin à moi-même. Il faudrait que je m’observe de plus près.

19 février 2011

Drogué

Après avoir fumé quelque chose de vaguement cannabique, je me souviens avoir photographié l’assistance en utilisant ma chaussure gauche comme appareil photographique. Le flash était représenté par ma semelle au charbon de bois actif et je criais des clics clics tout en sautillant…

8 février 2011

Préjugeant

Tête de poisson, estomac de bœuf et de porc, pied de canard, patte d’ourson, serpent, tripes, tendons, nerfs, chien, chiot, chat, chaton, veau, vache, cochon… pour « le » chinois, tout est délectable.

7 février 2011

Mallarméen

Comprendre vraiment Mallarmé me semble une gageure. Renoncer me semble sage. Stéphane n’est que d'autre part, un bouquet brandillant, sa propre frondaison, avec d’autres racines, haut, très haut.

5 février 2011

Colonialiste

« Le rhum est poétique comme les anciennes colonies françaises, l'impératrice Joséphine, la marine à voiles et les frères de la Côte.»

(Eugène Marsan, Savoir-vivre et savoir s'habiller)

4 février 2011

Privilégié

Stendhal, les Privilèges. Court bréviaire où l’ami Beyle recense vingt-trois « privilèges » tous plus croquignolets les uns que les autres : disparition de la douleur, invulnérabilité, omniscience… des napoléons d’or vous poussent dans les poches, les femmes tombent instantanément sous votre charme, le gibier sous votre fusil, et sous votre fourchette la viande est toujours bonne… Cette courte lecture est très agréable, l’on ne s’y ennuie jamais et l’ami Beyle est quand même assez drôle. (L’un des axiomes stendhaliens veut qu’il n’y ait jamais d’ennui, sinon…)

27 janvier 2011

Hindou

Saviez-vous qu’en Inde la fiente des vaches sacrées tombe avec les étoiles ? Saviez-vous que la bouse verte des éléphants blancs forme une longue prairie où l’hindou aime à gambader ? Le saviez-vous ?

22 janvier 2011

Poli

Le Savoir vivre et savoir s’habiller d’Eugène Marsan est très bien, exquis dans ses façons de décrire la politesse début de siècle (dernier). On y apprend comment soulever son chapeau, comment tendre une main et serrer une autre main, comment recevoir et être reçu, comment, et où, s’asseoir dans une diligence; toutes choses très utiles…

« L'aubaine des vieilles diligences, où les gens étaient serrés de telle sorte qu'ils étaient obligés de multiplier les égards, l'aubaine, dis-je, était qu'une belle, fermant ses doux yeux, laissât tomber sa tête sur ton épaule. Tu n'étais pas forcé de la réveiller, si tout le monde dormait aussi. Tu regardais, tu contemplais sa chevelure dérangée, sa bouche entr'ouverte (elle avait son bibi sur les genoux). Les paupières hypocritement baissées, tu contemplais dans un raccourci à l'italienne son beau visage... »

18 janvier 2011

Abandonné

La main de l’un dans le rêve de l’autre.

Le sommeil peut tirer des larmes à qui sait le regarder. Cet abandon, ce corps si docile, en sécession, cette respiration, ce souffle qui parle plus haut que la vie, ce rythme touchant et pacifique, sans haine, dans une confiance admirable où tout est livré, c’est l’inverse de la mort où tout se retire dans un vide monstrueux où tout n’est plus qu’un dans une unicité abjecte ; l’unicité abjecte d’une enveloppe vide qui ne songe plus.

17 janvier 2011

Mécanique

J’espère que vous me pardonnerez ces valétudinaires fantaisies musicales, elles n'ont pas grand-chose pour elles en dehors d’un vague petit charme mécanique…



« L'insuccès nous vaut au moins d'être seuls ; et au pauvre de n'être plus - comme le roc et les genêts de la lande - labouré que par l'orage, ni baisé que par l'aurore. »

16 janvier 2011

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« Avec ma machine, je vous fais sauter la tête en un clin d’œil, et vous ne souffrez point. »

(Docteur Joseph Ignace Guillotin)

15 janvier 2011

Chapeauté

Tu as un chapeau. Qu’est-ce que tu en fais ? Il te couvre, il t’abrite, il te préserve du pinson qui passe. Mais il te sert aussi à saluer. Tu portes ta civilité sur la tête.

14 janvier 2011

Elliptique

L’ellipse est le trope des solitaires.

10 janvier 2011

Séparé

J’ai accepté d’être essentiellement seul, mais mon point d’humanité fait que semi inconsciemment ma solitude espère être partagée par le domaine du sentiment. C’est évidemment une illusion, un mirage où mon semi-inconscient frémit et j’ai beaucoup de mal à lui faire croire en la sourde réalité de mon isolement.

7 janvier 2011

Stylite

Je crois en l’homme lorsque je ne le vois pas. Loin de lui je crois en lui. Il m’arrive même de penser à lui (oui je pense parfois à ce gibbon gigotant dans sa cage). Loin de lui j’oublie ses grimaces, je rêve à ce qu’il pourrait être, je ne me souviens plus de ce qu’il est.

5 janvier 2011

Rien